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Le thème de la Vierge accompagnée de l’Enfant, debout sur une nuée, le pied gauche posé sur un globe, se rencontre quelques fois dans la statuaire flamande du 18e siècle, comme dans une statue sous dais au coin de la Lange Klarenstraat et de la Lange Nieuwstraat à Anvers. L’une des singularités dans l’oeuvre étudiée est l’attitude de Jésus, les bras en croix dans un geste prémonitoire du sacrifice de la Croix. A l’origine, Jésus tenait un sceptre, symbole de sa royauté sur terre, ou un petit crucifix.
Nous connaissons une seconde version de cette sculpture, également en terre cuite et peinte en blanc, conservée au Vleeshuis Museum d’Anvers (Ht. 52 cm, inv. III.25.A1069). De dimensions quasi similaires, elle est signée « J.E. Pompe » pour Jan Engelbert Pompe (fig. 1).
Les deux statues dérivent d’un modèle commun tout en présentant des différences significatives. Dans la version étudiée, Marie est coiffée d’une
légère étoffe sous le voile couvrant sa tête, élément absent dans la version du Vleeshuis. Dans cette dernière, la masse nuageuse sur laquelle se tient
l’Enfant Jésus semble en suspension dans l’air, alors que dans l’autre version, une colonne nuageuse semble porter le nuage servant de piédestal à Jésus.
On remarque aussi que l’Enfant Jésus pose le pied sur une sphère dont l’anneau zodiacal est disposé différemment dans les deux versions. Du point de vue du traitement des formes, la version du Vleeshuis présente un drapé au plissé plus serré et plus nerveux, tandis que la présente version, aux proportions plus élancées et au visage aux traits plus classiques, offre un modelé plus subtile dans
les carnations, comme on peut le voir dans la fine main à fossettes de Marie, tenant le pommeau de son sceptre disparu.
Jan Engelbert Pompe fut, écrit son biographe, le prêtre P. Visschers, « een beeldhouwer in den vollen zin des woords »1 Elève de son père, le célèbre Walter Pompe (Lith 1703 – Anvers 1777) et membre de la guilde de Saint Luc d’Anvers de 1768 à 1776, Jan Engelbert collabora aux dernières réalisations de Walter Pompe, personnalité emblématique de la pérennisation du baroque tardif de l’école anversoise au 18e siècle. Parmi les oeuvres auxquelles il participa, on cite les statues de l’hôtel de ville de Middelburg et celles de l’église de la Leeuwenstraat à
Rotterdam.
Jan Engelbert fut apprécié de son vivant. Parmi les amateurs les plus distingués de son talent, l’archevêque d’Anvers, Cornelis Franciscus de Nelis qui lui assura sa protection et lui commanda son buste (non retrouvé), et le chanoine J. Tassaert. La liste de ses oeuvres, établie par P. Visschers, témoigne de son succès2. On y trouve des statues et statuettes en terre cuite, en marbre, en buis et en ivoire, tant religieuses que profanes. C’est ainsi qu’il exposa au Salon de Gand de 1796 un Christ en croix avec la Vierge et saint Jean, une Vénus et Cupidon, un Bacchus accompagné d’un jeune satyre. On notera que durant le froid hiver de 1772, il réalisa pour le compte de l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers, plusieurs statues monumentales de glace de dieux antiques dispersées dans la ville, une Thétis assise sur un dauphin, une Flore, et Hercule combattant le lion de Némée (fig.2).
Pourtant, malgré une abondante activité, les oeuvres répertoriées de Jan Engelbert sont rares. Mentionnons un Christ en ivoire dans l’église Saint-Antoine de Padoue à Anvers, un petit basrelief en ivoire représentant Flore, daté de 1773 (Anvers, Vleeshuis Museum) (fig.3), et le modello en terre cuite pour un porte-montre avec une allégorie du Temps (localisation actuelle inconnue).
La personnalité artistique du sculpteur nous échappe dès lors pour une bonne partie, de là l’intérêt de cette Vierge à l’Enfant qui témoigne à la fois de l’influence de Walter Pompe (fig.4) et de la détente formelle de la dernière phase du baroque qui s’affirme dans le milieu anversois des années 1770/1780. Sa Vierge à l’Enfant trahit en effet le style plus calme et plus léger des sculpteurs baroques flamands de la génération de Jan Engelbert, qui est celle qui précède le néoclassicisme. Cette découverte permet aussi de considérer la part certainement importante prise par Jan Englebert Pompe dans la réalisation des dernières statues issues de l’atelier paternel comme la Saint Agnès de l’église Sainte-Croix de Turnhout, de 1775 (fig. 5). On y retrouve en effet des similitudes de style qui pourraient remettre en question les rapports entre un père, âgé de plus de soixante-dix ans, et un fils alors en pleine maturité créatrice. L’absence de la signature du sculpteur sur la Vierge à l’Enfant peut s’interpréter comme une
seconde version originale sortie de l’atelier de Jan Englebert Pompe.
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